Hiram-Abif / Hiram-HAB
La Bible désigne Hiram-Abif comme un habile artisan qui fabriqua une bonne
partie du mobilier destiné au temple de Salomon. Son père était tyrien, mais
sa mère était une veuve « de la tribu de Nephtali 22 » OU « d'entre les
fils de Dan ». Cette contradiction apparente s'explique si l'on considère,
comme le font certains biblistes, que cette femme naquit dans la tribu de Dan,
devint veuve d'un homme de la tribu de Nephtali, puis se remaria avec un tyrien.
Cette histoire de veuvage donnera l'expression maçonnique les « enfants de la
veuve ».
A l'instar d'Hiram, enfant de la veuve, Jésus l'était aussi selon diverses
sources gnostiques, ce qui explique l'absence total des références à Joseph
dans les Évangiles.
La notion de veuvage a une influence sur la religion chrétienne, précisément
sur le christianisme occidental. Sainte Monique, par exemple, a mis au monde son
fils Augustin « dans les larmes et la prière » ; sainte Brigitte, veuve et mère
de huit enfants, fonda « l'ordre du Saint Sauveur ». Le sujet mérite réflexion
: Jean Tourniac : « A la seule lecture de l'Ecriture, la veuve joue un rôle
particulier dans les événements d'une nature spirituelle d'extrême
importance, puisqu'il s'agit en chaque circonstance d'une » résurrection »,
préfiguration ou symbole de la vie éternelle.
Ainsi en va-t-il de la résurrection du fils de la veuve de Sarephta,
quand le prophète Elie, après s'être étendu sur le mort, « fils de la veuve
», lui redonne vie en invoquant par trois fois le nom du Très-Haut, YHWH.
(Voir le premier Livre des Rois, chapitres 17-18.)
Hiram, roi de Tyr, décida d'envoyer Hiram-Abif diriger la construction spéciale
de Salomon en raison de ses talents et de l'expérience qu'il avait acquise dans
le travail de l'or, de l'argent, du cuivre, du fer, du bois et de la pierre. Cet
artisan avait sans doute reçu, dès son enfance, une formation aux arts et aux
métiers de l'époque grâce à son père tyrien, lui-même artisan accompli, spécialisé
dans le travail du cuivre". La plupart des documents maçonniques désignent
Hiram Abif par les initiales HA, mais quelques autres plus anciens utilisent les
initiales HAB. Cela indiquait, selon John J. Robinson dans Les Secrets perdus
des Francs-Maçons, qu'à une certaine époque son nom était Hiram A. Bif.
Un examen attentif du dictionnaire français fit apparaître le verbe « biffer
», synonyme de rayer ou d'éliminer. Selon John J.-R., le terme maçonnique n'était
donc pas un patronyme. « Hiram à Biffe » signifie simplement « Hiram qui fut
éliminé ». Cette interprétation contredit la Bible, car le roi Salomon avait
effectivement fait venir un ouvrier du bronze, fils d'une veuve de la tribu de
Nephtali et d'un père tyrien, Hiram Abif. L'ouvrier du bronze, maître maçon
et architecte est bel et bien Hiram Abif. C'est à lui que le roi Salomon fit
faire tous les objets en bronze poli qu'il avait coulés dans la plaine du
Jourdain, dans un sol argileux, entre Socot et Sartan".
Deux auteurs britanniques, Rosenbaum et Mark, penchent vers l'hypothèse selon
laquelle Hiram, père et fils, ont été impliqués dans le récit biblique
relatif à l'artisan. Ils écrivent que certaines références indirectes à la
disparition du royal architecte existent dans les Écritures Saintes. Hiram
serait le descendant de la tribu de Dan, l'autre de la tribu de Nephtali.
Ilsjustifient la contradiction entre les qualités d'Hiram Abif, telles que nous
les donnent les Livres des Rois où il est décrit comme « travailleur du
cuivre » et les Chroniques où de nombreux autres talents lui sont attribués.
Selon ces auteurs, Hiram, le père ne travaillait que le cuivre, alors que le
fils aux dons multiples aurait construit les colonnes. C'est ce dernier, fils de
la tribu de Nephtali par sa mère, qui serait devenu le fils de la veuve à la
mort d'Hiram, son père. Apparemment, le roi de Tyr appela cet homme Hiram-Abif,
nom qui signifie littéralement Hiram, mon père. Il ne faut toutefois pas en déduire
que ce Hiram était réellement son père. Peut-être le roi voulait-il dire
qu'il était son conseiller » ou son maître ouvrier ». De même, la formule
Hiram-Abif (littéralement Hiram son père ») semble signifier « Hiram est son
maître ouvrier », c'est-à-dire celui du roi : il est donc le Grand Maître du
temple de Salomon. Hiram-Abif a présidé à la construction du temple, il est
donc constructeur, bâtisseur et architecte. Le même Hiram-Abif a également présidé
à la dédicace du temple.
Sur ce point, le Rite Ecossais Rectifié se démarque d'une manière notable des
autres rites, pour lesquels celui qui présida à la dédicace fut le roi
Salomon et non Hiram. Pour le Rite Écossais Rectifié, Hiram-Abif n'est donc
pas seulement un « habile architecte » : puisqu'il préside à la dédicace,
il a un caractère sacerdotal. Il est à la fois roi, prêtre et prophète. Il
est le « père » et le modèle des vrais Maçons. Or, qui est le « père des
hommes » selon la chair ? Adam.
Et qui est leur père selon l'Esprit ? Dieu Créateur. Enfin, qui est leur «
modèle » ? Le nouvel Adam, le Christ, homme parfait. Toujours dans le même
ordre d'idées, la pratique du RER démontre qu'Hiram est un mythe fonctionnel
ou opératoire. Or le mythe, par nature, opère une fonction : c'est en quoi il
se différencie de la légende. Celle-ci est simplement narrative ; en tant que
telle, elle peut être révélatrice ou symptomatique, mais elle n'est pas
fonctionnelle. Donc, la fonction du mythe d'Hiram est simplement initiatique. Jésus
est un Maître réel et Hirarn-Abif un Maître mythique.
C'est au premier grade du rite écossais rectifié que commence l'histoire du
Christ et d'Hiram. Dans un autre ordre maçonnique chrétien, il est dit : « Le
mystère symbolique de la mort d'Hiram représente pour nous celle du Messie.
Par exemple, les trois attaques essuyées par l'architecte aux trois portes du
Temple font allusion aux trois motifs de condamnation du Christ aux tribunaux de
Caïphe, le grand prêtre, du roi Hérode et de Pilate, le gouverneur romain. »
Tout est déjà dit et il n'est nul besoin de passer dans les grades latéraux
pour connaître les auteurs de ce crime !...
Pour comprendre ce thème, il faut connaître la légende d'Hiram. En voici un résumé.
Trois compagnons, au cours de la construction du temple, veulent contraindre
Hiram Abif à leur livrer les secrets de la Maîtrise. Hiram refusant de les
livrer est tué et enterré par lesdits compagnons. Les différentes classes
d'ouvriers ne recevant plus les plans et les instructions, le travail est arrêté.
Les surveillants se rendent auprès du roi Salomon pour lui faire part de la
confusion qui résulte de l'absence d'Hiram. Salomon prescrit une enquête qui
aboutit à la découverte du cadavre d'Hiram. Il annonce alors que, par la mort
prématurée d'Hiram, les secrets de la maîtrise sont perdus. Des signes et des
mots nouveaux serviront dès lors à désigner les Maîtres Maçons jusqu'à ce
que le temps et les circonstances fassent retrouver les véritables. La légende
s'arrête là : les secrets sont perdus, rien n'indique que les plans et les
instructions pour la poursuite du travail aient été fournis par quelqu'un
d'autre. Hiram est mort, le Temple n'est pas achevé. Cette légende est en
contradiction avec le texte sacré commun aux juifs et aux chrétiens et, en un
sens, on pourrait dire qu'elle est aussi inacceptable pour les uns que pour les
autres. Du point de vue judaïque, elle ne peut avoir aucun sens acceptable,
elle ne peut apparaître que comme sacrilège. En revanche, du point de vue chrétien,
le sens est conforme : le Temple de Salomon ne pouvait être le Temple parfait
et c'est seulement par la venue du Christ que l’œuvre du ciel et de la terre
trouve son couronnement. Il existe donc en Franc-Maçonnerie un ésotérisme chrétien
ou plutôt "christique" conforme aux enseignements du Christ, à la
transmission apostolique et à la tradition ecclésiale. La symbolique du Temple
est en référence au temple qu'est le Christ maintenant représenté par le
peuple de Dieu, nouveau temple vivant et communauté pratiquant "en
esprit" les préceptes de la religion naturelle.
Dans le Rite Ecossais Rectifié est respecté le sens profond du processus
initiatique de la Franc-Maçonnerie. Hiram apparaît au 3ème grade des loges
bleues, mais d'une façon imparfaite et voilée. Il est présent en pleine lumière
au quatrième grade, dit Maître Ecossais de saint André. La Bible est un livre
codé. Hiram ne serait-il pas l'image du Christ ? Au Moyen Âge, Jésus s'écrivait
Hiesus avec H initial, et c'est le lieu de rappeler cet acrostiche que la
tradition nous a légué : H.I.R.A.M : Homo Iesus Rex Altissimus Mundi, «
l'homme Jésus, roi très haut du monde ». Hiram, c'est aussi l'homme (avec le
même H initial) redevenu semblable au Christ-Jésus. La Franc-Maçonnerie est
d'origine chrétienne et l'on retrouve les traces du christianisme dans tous les
rituels en vigueur : écossais, moderne, émulation, rectifié. Dans celui du
Rite Ecossais Ancien et Accepté" par exemple, on trouve des passages tels
que : « Fais aux autres le bien que tu voudrais qu'ils te fassent" » ; «
Demandez, on vous donnera » ; « Cherchez, vous trouverez » ; «Frappez, on
vous ouvrira ». Ce rituel précise en outre que les loges du Rite Ecossais
Ancien et Accepté sont des loges de saint Jean ! En conclusion, ainsi qu'il est
dit dans les évangiles, Dieu se trouve au milieu de toute assemblée d'au moins
dix hommes réunis en son nom....
Δ